lundi 17 mars 2008

L'amour ordinairement virtuel

Un article de plus sur le sujet, tiré de là, allez donc y jeter un oeil ;) : http://souffledici.blogs.courrierinternational.com/archive/2008/02/07/quand-l-amour-se-met-au-net.html

Séduction en lignes

Internet, paradis des timides ou paradis des séducteurs zappeurs ? L’art de la correspondance, le libertinage virtuel où l’on écrit de toute son âme et où tout semble flotter permet-il d’ancrer la rencontre dans une réalité ? La rencontre se réalise normalement grâce aux cinq sens. Or, la séduction sur le Net passe par l’écriture et ne peut transmettre la synesthésie du réel.

L’autre est abordé par l’usage des mots, par une passion partagée et non seulement par la simple apparence physique. L’inconnu(e) de l’autre côté de l’écran est toujours sublimé(e). Le corps est oublié et ouvre de ce fait tous les possibles, désinhibe toute forme d’expression intime. Les corps sont cependant aussi mobilisés dans l’échange virtuel. Les sensations liées au transport amoureux apparaissent chez les utilisateurs de sites de rencontre à travers notamment le fantasme.

Les utilisateurs compte en moyenne six rencontres réelles par année. Seules 5% de ces rencontres aboutissent à une union durable. Pourtant, une série de témoignages parlent de la réussite des rencontres via le Net, comme s’il suffisait désormais d’introduire des données, des critères dans un fichier, puis de sélectionner, trier, rationaliser. En un click, je dis oui, en un autre, je delete : voilà le phénomène social de zapping relationnel, de consommation de la rencontre. Malgré ce côté pragmatique des sites de rencontre, l’imprévu reste roi sur le Net comme dans tout jeu amoureux.

Les internautes publient leur disponibilité, déclarent haut et fort leur solitude afin de venir combler le vide. Chercher, séduire est mal perçu dans les lieux communs, comme si une étiquette était collée sur le visage du célibataire. La société contemporaine ouvre tous les possibles et simultanément exclut ceux qui n’arrivent pas à s’accommoder à ce semblant de liberté. Dans le monde virtuel des sites de rencontre, le célibataire ne se sent plus seul et chercher n’est plus connoté de manière négative. Le risque de jugement cependant persiste encore puisque le profil des utilisateurs est en ligne et par conséquent visible au public mais les contraintes temporelles, spatiales, sociales sont levées.

Simulation et dévoilement

De l’identité fragmentée postmoderne, nous accédons à l’identité cybernétique, simulée, jouée, sans cesse réinventée, imaginée. Le célibataire se sent seul, il se rend sur un site de rencontre, construit une image de soi, choisit un pseudo, confirme par la même que Je est un autre (Rimbaud). Il crée un profil, un masque avec des mots, des photos, échange des messages, utilise le chat, il tremble, chaque mot est un cadeau, puis une image se forme. Le dévoilement est un jeu théâtral subtil. Le Net est la scène, l’internaute le metteur en scène et l’acteur. On se raconte à travers le miroir de l’écran. Vient alors le téléphone, la voix qui nous surprend, qui nous interpelle, puis la rencontre réelle. L’écran s’efface et laisse place aux corps. Le confort, la sécurité de l’anonymat tombe alors, bouleversé par un visage, un regard, une expression.

Imaginez la rencontre sans le filet du Net… Ovide, dans l’Art d’aimer, précisait les lieux où il était plus facile, plus vraisemblable de rencontrer du monde, pour séduire, conquérir. Or, qui ose aujourd’hui aller dans un café au bord d’une plage, parler à Madame et la séduire tout en prenant le risque d’un refus en public ? Emmitouflé dans un fauteuil du salon, l’ordinateur sur les genoux, le célibataire est rassuré. Aucun doute, il est beaucoup plus aisé d’exercer son « art d’aimer » sur un lieu virtuel, de jouer avec les mots, de simuler… jusqu’à l’ancrage réel de la rencontre. A cet instant précis, l’écran aura permis à l’internaute de se penser lui-même et de se révéler à travers l’autre.

Et demain ?

Il y a dix ans, les sites de rencontre n’existaient pas. Et dans dix ans, à quelles mutations technologiques seront-ils soumis ? Aujourd’hui l’écriture est reine, elle cultive l’imaginaire, le rêve, qu’en sera-t-il dans le futur ? Les sites de rencontre voudront de plus en plus rattraper la réalité, s’y confondre en s’appuyant sur la synesthésie. L’écrit laissera complètement sa place à l’image, les blancs seront comblés, le simultané supplantera le différé : dialogue audio, webcam, vidéos personnalisées. L’interactivité sera chose quotidienne, les relations virtuelles deviendront presque réelles.

On assistera à une sophistication des portraits. À une forme de théâtralisation prononcée. On observera l’apparition de « Net-Tél » (passage du cadran à l’écran), les yeux seront la base de l’interface, le son sera directement fixé dans l’oreille. On sera tous reliés au cyberspace, dans le métro, dans une salle d’attente, en forêt, dans notre bain. Notre identité éclatée sera forgée à travers le numérique. Le cyberspace sera notre origine universelle où les liens tissés laisseront supposer un semblant d’harmonie.

3 commentaires:

Rose a dit…

Moi, je pousserais plus loin et je vois dans l' usage du virtuel le moyen pour des couples en voie d' extinction de se re-séduire et de se re-re-séduire. On ne se verra plus que pour "faire l'amour" lorsque l' échange de fluide cybernétique ne sera plus possible et que le "rendez-vous" redeviendra un véritable "Rends les armes...mon amour et cesse de t'escrimer avec tes mots...je veux sentir ton fleuret"...

Rose a dit…

Sur cette écran, JOUISSANCE, j' écris ton nom:

RELOADING

"j'ai envie de te télécharger dira-t-on"
Dans les milieu parisiens de St Germain des prés, on dit "Mettre sa disquette" pour signifier DRAGUER.
Tout n' est que LOGICIEL: Loges-y le Ciel, et je rajoute "peu m' importe le doigt pourvu que j' aies l' étoile"

Rose a dit…

"La toile..."